En février 2006, j’ai goûté pour la première fois au bonheur d’être maman. J’ai fait mes premiers pas dans cet univers où on n’est plus seulement soi-même, on est « la maman de »… Cet univers où le sommeil se fait désirer, où l’amour fait mal au ventre parce qu’il est trop violent, où l’émerveillement ne finit jamais. C’est ma grande fille qui m’a entraînée dans cette belle aventure.
Une fille. Autant nos petits garçons éveillent en nous des sentiments de fierté et un urgent besoin de « prendre soin », les petites filles, elles, nous attendrissent. Inévitablement, on se voit en elles… La mienne ne me ressemble pas de l’extérieur mais a très clairement hérité de mon auto-analyse sentimentale exacerbée!
Toute petite, elle m’expliquait qu’elle ressentait de la colère, de la jalousie, de la honte. Elle a été une grande fan de mon amie Caro, qui lui a appris à « pleurer de beau ». Et depuis, elle a pleuré de beau, de joie, de peur, de colère, de regret, de fatigue et, chaque fois, elle savait mettre un nom sur ses larmes et me les raconter.
Plus jeune, je me plaisais à m’imaginer ce que ce serait d’avoir une fille. J’avais alors un beau film dans ma tête avec des poupées, des barbies, des coiffures, du bricolage, des souliers roses, des belles robes…Pour ceux qui la connaissent, vous conviendrai que la tendance de mon aînée à la « princesserie » a dépassé largement mes projections imaginaires!
Au début, j’en étais ravie. J’aimais m’identifier à cette petite fille coquette et toute féminine qui jouait à « être belle » . Mais aujourd’hui, je suis frustrée. Vraiment vraiment frue. Parce que je comprends que la princesserie, ça ne s’arrête jamais. Quand on a 5 ans, on apprend qu’une princesse doit avoir de belles robes, manger proprement, chanter à merveille et être toujours souriante. Quand on a 32 ans, on apprend que pour être une princesse moderne, on ne doit pas avoir une livre en trop, avoir les dents blanches, habiter dans une belle maison, travailler et être une maman et, malgré tout, être toujours souriante! Ah! Et il ne faudrait pas oublier d’être à la mode!
Honnêtement, depuis que ces choses m’ont sautées aux yeux, je n’ai plus le même plaisir à voir ma fille jouer à la princesse. Je suis ronde, je l’ai toujours été. Je suis comme une princesse de Disney qui ne sait pas chanter. Une Barbie chauve. Une fraisinette qui ne sent rien… Je suis automatiquement disqualifiée. Cette pression, cette étroitesse d’esprit, cette rigidité dans les standards, elle leur est présentée dès qu’elles mettent le nez hors de notre ventre! À 4 ans, mon adorable petite a fait un ménage de ses Barbies. Sans hésiter, elle s’est débarrassée de toutes celle qui étaient un peu différentes…. Des cheveux courts, une peau foncée, plus petite que les autres, plus grande que les autres… Elle n’a gardé que les Barbies « standards ». Je me suis alors demandée pourquoi, à 4 ans, je devais déjà m’asseoir et lui expliquer que la beauté a plusieurs visages? Parce qu’aucune Barbie n’a de petite poitrine ou de gros ventre. Parce qu’aucune héroïne de Disney n’a de vergeture ou de cerne. Parce qu’aucune Fraisinette n’ a les cheveux courts ou un gros nez. J’ai puisé dans mes trippes pour lui expliquer avec le plus d’aplomb possible que chaque fille est belle à sa manière, que la beauté vient du dedans, de la différence, de l’unicité. Mais je ne crois pas l’avoir complètement convaincue….Comment j’aurais pu moi qui, depuis toujours, vit en traînant le fardeau de « n’être pas mince » comme un horrible boulet. Moi qui truckerait bien des choses pour ressembler aux autres « princesses » dans les magazines. Ma tête me dit que c’est ridicule. Mon cœur me dit que ça n’a aucune importance. Mais la pression est trop forte et la comparaison trop inévitable….
Je sais, ma fille grandira. Avec un peu de chance, héritera des gênes de son papa qui lui éviteront d’avoir à se soucier de son poids…. Mais peut-être aussi que l’héritage de sa maman ne l’épargnera pas. Je donnerais tout pour faire un RESET dans son petit cerveau. Repartir à neuf et lui montrer toutes sortes de poupées, des grosses, des grandes, des poilues, des frisées… Elle ne jouerait pas à être une princesse, elle jouerait sans pression à être une petite fille innocente et sans souci qui se tient bien loin des miroirs. Je m’assurerais ainsi que son reflet ne remette jamais en question sa valeur. Je la connais moi sa valeur. Elle a un cœur grand comme la terre, un esprit vif et allumé, une analyse du monde unique. Je ne laisserai aucune Barbie, aucune Bratz insignifiante, aucune fraisinette, aucun livre, aucun foutu pet shop lui enseigner autre chose….Qu’on se le tienne pour dit!
http://www.youtube.com/watch?v=xSD9npkUqRw
Véronique dit
Excellent texte. ça me fait réfléchir pour quand j,aurai le bonheur d’être maman d’une ou plusieurs filles. Pour l’instant j’ai deux trésors de sexe masculin, mais sait-on jamais…
Isabelle dit
Ces gênes qui lui éviteront d'avoir à se soucier de son poids…
Désolée de péter ta balloune ma belle, mais ce n'est pas si simple que ça. 😉
admin dit
C’est sûr Isabelle…De toute façon, si ce n’est pas le poid, ce sera autre chose, la rigidité des standards s’étend bien au-delà de ça!
Céline Marcotte dit
Je crois qu'il n'est pas trop tard pour inculquer une nouvelle façon de voir les choses à ta petite.D'autant plus que Dieu peut faire de merveilleux reviremens de situation et bien au-delà de ce qu'on peut imaginer…
Quant à toi, souviens-toi qu'il n'y a pas que les Barbie qui sont de belles poupées. Je me souviens très bien avoir entendu ton mari dire que tu étais sa belle poupée de porcelaine , le jour de votre mariage.