C’est immanquable. À chaque été, quand vient le temps des vacances, je trouve sur mon chemin une personne ahurie qui s’empresse de me poser la question.
« Du camping?! Du vrai? Dans une tente? Avec tes trois enfants? Mais diantre… POURQUOI!!?? »
La question est loin de m’offusquer. En fait, je la trouve très légitime. Il m’arrive même de temps en temps, quand il pleut averse dans ma tente ou que l’un de mes enfants m’oblige à être la première du campement à mettre le nez dehors, de me la poser à moi-même cette question!
Avouons-le, le camping en tente avec des jeunes enfants, ça comporte ses défis!
D’abord le défi hygiène! Je ne suis pas une fanatique de l’hygiène dans tous les racoins et à toute heure comme certaines de mes amies, mais quand même, je ne suis pas tout à fait à l’aise quand j’ai l’impression de sentir les bactéries proliférer sur mon corps à force d’être sale. Je privilégie habituellement les odeurs corporelles agréables.
Bien sûr, il y a des douches sur les campings… Des douches elles-mêmes souvent douteuses, dans lesquelles on hésite à se déshabiller parce qu’on se sent épiée par la horde d’araignées qui décore le plafond! Des douches dans lesquelles s’amoncellent du sable et des poils inconnus. Mais tout de même, on pourrait croire que cela suffise à nous procurer une hygiène décente! La vérité, c’est que dès qu’on sort du complexe sanitaire, avec nos gougounes qu’on a bien sûr gardées dans la douche, on se retrouve avec de la terre entre les orteils dans le temps de le dire!
Et c’est sans parler des enfants qui se vautrent dans le gazon où l’on sait pertinemment que les visiteurs précédents ont déversé le contenu de leur vessie à maintes reprises, trop fatigués ou trop saouls pour parcourir les quelques mètres qui les séparaient de la salle de bain!
On ne fait pas du camping pour se sentir propre, c’est bien convenu. Mais alors, la question demeure; Pourquoi?
Certains diront que c’est le contact avec la nature qui nous attire.
Hum… Je serais portée à nuancer. La nature a aussi ses hauts et ses bas. Autant le bruit de la pluie qui pétarade contre la toile de la tente peut se révéler enchanteur, autant l’expérience peut être pénible quand la dite toile a fait son temps et ne retient plus la pluie.
Ça nous est arrivé l’an dernier. Nous avions laissé la précieuse bâche à la maison et avons été contraints à une averse intérieure toute la nuit durant… Après avoir tenté vainement de lancer des sacs de poubelle sur le toit de la tente en hurlant et avoir pleuré de rage alors que mon mari dormait depuis longtemps, j’ai dû abdiquer et subir cet affront de la nature que nous aurions volontier évité…
La nature, c’est aussi choisir un camping à St-Tite sans savoir qu’il abrite des colonies entières de ces sublimes araignées à longues pattes (des faucheux je crois…) qui se faufilent partout, et en rapporter quelques dizaines à la maison tant elles ont infiltré nos affaires!
Ce sont les perces-oreilles qui envahissent les vêtements sur la corde à linge et le fond du bac à nourriture…
Bref, la nature, ce n’est pas toujours que du bonheur! Alors la question demeure entière : POURQUOI?!
Pourquoi récidiver même après avoir passé deux nuits à promener son petit en poussette dans les sinueux chemins d’un camping, pensant venir à bout de ses hurlements? Le pauvre, il avait choppé un streptocoque (probablement suite à sa dégustation de gazon imbibé de pipi)! Pourquoi recommencer, année après année, malgré les nuits parfois froides et les voisins plus ou moins du monde?
N’ayez crainte, j’en viens à une réponse. J’en ai une. J’en ai même plusieurs.
Je fais du camping, d’abord et avant tout, pour faire résonner à profusion les rires de mes enfants. Mes trois joyeux lurons qui vivent chaque année le rêve universel de « dormir dans la cabane » qu’on a construite avec des couvertes. Dormir avec presque rien au-dessus de nos têtes. Dormir quasiment dehors.
Dès qu’ils mettent le pied sur le terrain, leurs rires se multiplient, les roues de leurs vélos se mettent à tourner. Ils ont tout à coup envie d’être dehors, sans même attendre l’habituel « coup de pied au derrière ».
Je fais du camping, moi la madame urbaine, parce qu’il reste quelque chose, dans cette nature qui me dérange un peu, qui me fait du bien. La semaine dernière, j’ai dormi avec un hibou qui hululait au-dessus de ma tête. Autant je méprise les moustiques, autant je vénère le concert des criquets au crépuscule. Honnêtement, y a–t-il plus apaisant qu’une armée de criquets qui se paye la traite!?
Je fais du camping pour m’éloigner des miroirs. Suis-je la seule à avoir remarqué combien je me sens belle quand je suis loin d’eux? Quand le seul reflet de moi-même est celui que je croise dans les yeux de mon homme ou de mes gamins? La conscience de soi devient tellement différente. Plus juste. Plus saine.
Je ne veux pas savoir de quoi j’ai vraiment l’air dans mes joggings, les cheveux pleins de chasse-mouche et les aisselles à peu près rasées… Pour de vrai, je ne veux pas le savoir. Je vais en camping pour ça.
Je vais en camping pour fuir les écrans envahisseurs. Les IPAD, IPOD, portables et autres objets addictifs auxquels notre dépendance collective et familiale me fait parfois peur. En camping, on déconnecte tout. On sort les livres. On se parle. Je respire mieux quand personne n’est accroché à un écran. Quand tout le monde est là en même temps. Même les enfants ne pensent plus à demander la télé. On reste ensemble dans le moment présent, dans une réalité qui n’a rien de virtuelle.
Pourquoi je vais en camping? Pour être collée sur les gens que j’aime. Dormir avec eux, entassés. Me réveiller dans des vêtements qui sentent encore la boucane.
Je fais du camping pour mon couple. Les fraises et le champagne peuvent bien aller se rhabiller, le camping est un aphrodisiaque qui a fait ses preuves!
Je fais du camping parce que je n’ai pas une cenne! … C’est aussi ça la vérité! Planter sa tente quelque part, c’est accessible à tout le monde, même à une enseignante qui ne touche pas un sou pendant ses deux mois de « vacances ».
Et plus encore, j’ai le bonheur de partager mon camping avec des amis précieux qui le rendent croustillant à souhait, l’embellissent de leur présence.
Il était temps pour moi de répondre convenablement à cette question que l’on me pose trop souvent.
Je pense que c’est mission accomplie!
Vous avez d’autres questions?…
Si jamais je vous ai donné l’envie d’essayer, voici quelques références de campings où il fait bon tenter le coup (sans les araignées):
Powder horn Family campgrounds, Maine
À lire aussi:
Helen Hayes Desjardins dit
Bonne explications!!!
Bon retour pour ton année scolaire!!
J’aime toujours te lire!!!
Tu es tres diversifiante!!!
A quand le prochain volume???
Bonne année a tous!!!
Judith Papillon dit
Six souffles en harmonie dans la tente. Voilà la principale raison de nos virées familiales de camping.
Sophie dit
Pour toutes ces raisons évidemment! Et je me retrouve parfaitement dans vos textes, celui de Julie et aussi dans le commentaire de Natacha… J’ajouterai même que partir en camping, c’est me sauver de la culpabilité, celle d’essayer d’oublier la petite brassée de lavage qui m’appelle quand je prends mes vacances à la maison. Et qu’il fait si bon étendre sur la corde, et pendant que ça sèche, pourquoi ne pas vider le lave-vaisselle et tant qu’à y être le remplir… Et finalement plier le linge qui vient de sécher… C’est à ça que ressemble mes vacances quand on se dit qu’on a bien mieux dans notre cour que ce que le camping peut nous offrir! Sans compter les amis des enfants qui passent faire un tour, se baignent et restent à dîner et souper, quand ce n’est pas à coucher et déjeuner… Vous voyez le genre et imaginez la suite??? Alors une raison de plus pour s’échapper de tout ça, en camping, même en tente (par ce qu’on a vendu la roulotte les enfants devenus grands…) !!! Et vive le premier café du matin, sur ma chaise pliante avec le bruit des oiseaux!!!
Mélanie dit
Hahaha! C’est TELLEMENT ça! Le passage sur l’hygiène me parle énormément (surtout avec un bébé!) et quand tu parles de la grève des écrans qui pousse à l’ouverture d’un livre! La proximité entre tous les membres de la famille, même notre chien, est bénéfique! Jamais, au cours de l’année, nous sommes autant ensemble!
Merci pour ce texte bien écrit et parlant!
Natacha dit
Quel beau texte… ENCORE! 🙂 C’est tellement vrai, que j’en ai les larmes aux yeux! (je suis due pour mes vacances, je crois bien!)
Nous, avec nos 3 enfants de 2 à 10 ans, on part la semaine prochaine pour 8 jours de camping. 8 jours pendant lesquels on tirera sur la ‘plug’. Bien qu’on ait une roulotte – étant un peu plus ‘princesse’ que vous! – nous non plus, aucun écran (télé, téléphone, iPad, iPod) n’est accepté pendant les vacances – mon pur BONHEUR! Randonnées pédestres, randonnées à vélo, périodes de relaxation, baignade et visites culturelle sont au menu. Et les enfants adorent ca!
J’ajouterais qu’on part en camping… pour notre santé mentale! 🙂 Nous, pendant cette période, on se permet de vivre au rythme des enfants. On ose parfois même de faire une marche dans le camping AVANT le déjeuner ou prendre un deuxième café avant de faire la vaisselle pendant que les enfants font du vélo autour de notre terrain. Il nous arrive même de ‘Starter’ une partie de baseball avec les enfants du voisinage, mais on prend surtout le temps de montrer à nos grandes comment faire cuire des guimauves parfaites et de jaser longuement mon amoureux et moi autour du feu, alors que les enfants sont couchés… Oui, pour notre mental et le bien-être de notre vie familiale et de couple, c’est bon de ralentir le rythme endiablé du quotidien.
Bref, le camping pour nous, c’est ni plus ni moins… une thérapie! 🙂
Merci pour ce beau billet!