Certains se passionnent pour les voitures, dépensent des fortunes en outils et en pièces de toutes sortes. D’autres, épris de musique, se trimbalent d’un spectacle à l’autre, en quête d’émotions fortes. Plusieurs sont fans d’équipes sportives et vivent des moments intenses à regarder leur équipe préférée se débattre en direct. J’ai aussi l’une de ces passions.
Avec trois enfants, on a peu de temps pour nos passions. Je prends parfois quelques minutes pour gribouiller alors que je pourrais passer des heures à écrire. Rarement, je m’assois devant mon piano, le caresse un peu, le laisse me rappeler combien j’aime en jouer. Mais lorsque je veux vraiment prendre un moment pour moi, lorsque mon Adonis veut me faire plaisir et me donne carte blanche, je me dirige, inévitablement et sans hésitation, vers la bibliothèque.
Je suis une passionnée de bibliothèque! J’adore l’odeur qui nous frappe les narines quand on en franchi le seuil. Je respire à plein nez et je sens la zénitude monter en moi! On dit que c’est la colle qui sert à relier les volumes qui dégage cette odeur. Divine odeur. Et puis il y a le silence. Quand on vit en ville, que notre maison est pleine d’enfants et que l’on travaille dans une école, il est très rare que l’on se retrouve face au silence. Il nous échappe, même lorsqu’on le recherche frénétiquement. Il y a toujours un lave-vaisselle, un fan de douche, les pleurs d’un enfant, une ambulance, une affreuse moto (je pourrais facilement écrire un article complet et très étoffé sur ma haine des motos) ou un bruit lointain d’autoroute pour empêcher nos oreilles d’apprécier un véritable silence. Mais dans une bibliothèque, on frôle le silence absolu. On entend à peine quelques bruissements de pages qui tournent. Nos oreilles peuvent se régaler de ce rien du tout qui fait tellement de bien! Nulle part ailleurs je n’ai le cerveau dans un aussi bon état. Il se détend, il devient tranquille et par le fait même très productif.
Je passerais ma vie à la bibliothèque. Peu importe ce qu’on a en tête, on a de quoi se nourrir l’esprit. Le développement de nos enfants, l’Alzheimer de notre grand-maman, nos petits bobos du corps et de l’âme, un tas d’histoires vraies ou farfelues, des dates, des faits, des gens qui ont vécu, aimé, souffert et qui se racontent, de la poésie, des mots qui dansent, des recettes, des potins, des photos… Il me semble que chaque minute que j’y passe ne dure qu’un millième de seconde.
Mes enfants ont déjà cette même passion et je ne pourrais jamais faire l’inventaire de tout ce qu’ils ont pu en retirer. Ils y ont appris à cuisiner, ont découvert d’autres pays, ont pris conscience de l’univers, ont mis des mots sur leurs sentiments et ont permis à leur imagination de n’avoir aucune limite. Toutes les trois semaines, religieusement, ils retournent leurs six livres et se hâtent d’en choisir de nouveaux. Les premières fois, ils étaient plus hésitants, attendaient que je leur propose des livres. Maintenant ils foncent, passionnés, et rapportent toutes sortent de documents et de contes qu’ils mettent en belle pile avant de s’appliquer à choisir leurs préférés.
Nous sommes très prompts à offrir à nos enfants l’action, la stimulation… Des activités, des jouets, des promenades, des cours… Mais leur offrons-nous, parfois, le silence?
Le matin, ils entendent la télévision. À l’école, ils sont saturés de bruits de chaises, de cris, d’informations, d’agitation. Dans l’auto, c’est l’heure d’écouter un peu de musique. Et le soir, la maison est pleine des histoires que chacun brûle de raconter. Et puis il y a la balayeuse, le lave-vaisselle, le bébé qui pleure…
Même si l’expression « le silence est d’or » n’avait pas ce sens à l’origine, l’effervescence du monde dans lequel nous vivons a clairement donné à cette expression un nouveau sens. Le silence est d’or parce qu’il est trop rare. Le silence est d’or parce qu’il nous permet de nous entendre nous-mêmes. Le silence est d’or parce que nos corps et nos esprits le réclament. Pourquoi ne pas, de temps en temps, les contenter. D’autant plus qu’à la bibliothèque, le silence sent bon…..
Edith dit
J’ai travaillé pendant près de dix ans à la bibliothèque municipale et ce fut sans contredit mes plus belles années de travail. J’ai malheureusement dû changer de travail parce que l’horaire (soir et fin de semaine) ne convenait plus à notre situation familiale. Je reconnais très bien l’odeur du silence dont tu parles.
Ce sont vraiment les seules années où cela me rendait triste de dire: « J’ai perdu 5 livres!!! »
Karen dit
le samedi matin, c’est notre sortie de famille!! Pas tous le samedi, mais tres régulierement. je dirais qu’il ne reste qu’a ma derniere de comprendre qu’on ne court pas, on parle tout bas.. Ca devient un jeu.. Mon truc ?? Hey les filles, trouvez-moi un livre qui parle des chevaux… des princesses…. Beaucoup de plaisir!! Merci encore une fois de partager de petites pensées toute simples, mais tellement vrai. Je cours apres ce silence également, dans cette vie folle et saturé d’ordinateur, de portables, de télé, de téléphone intelligents.. définitivement, on ne s’en sort pas !! Sauf a la bibliotheque, ou tout cela est interdit 😉
Syndie dit
Parfaitement d’accord! Je pense avoir aussi transmis l’amour des livres à mes enfants! Si je leur demande ce qu’ils veulent faire, le mot bibliothèque revient souvent!
zab dit
Tellement d’accord!