Enfant-victime : – C’est pas de ma faute s’il y a du caca dans mes bobettes, c’est Mme Marcotte qui ne voulait pas me laisser aller aux toilettes!
Parent raisonnablement outré : – Ben voyons, est-ce que tu lui as dit que tu avais une envie de caca urgente?
Enfant-victime : – Oui, je lui ai dit plein de fois! Elle a dit que j’avais juste à y aller aux récréations. J’ai même pleuré et elle n’a pas voulu!
Parent raisonnablement outré qui s’emporte: – C’est quoi ce prof là! Je vais lui parler moi à ton prof!
Le lendemain, cette charmante petite fille de huit ans m’a tendue une lettre de sa mère avec un petit sourire en me disant : Tiens, c’est pour toi!
Dans la dite lettre se trouvait un beau recueil d’insultes bien senties avec beaucoup de points d’exclamations :
Ma fille a dû passer des heures dans sa marde parce que vous aviez pas le goût de l’envoyer aux toilettes!!! Elle avait toutes les fesses rouges et, même si elle pleurait, vous l’avez laissée comme ça! Je me questionne vraiment sur votre jugement professionnel et sur vos qualités humaines! Les enfants ont des besoins, des besoins physiques naturels!!!! Comment vous sentiriez-vous si on vous interdisait de faire vos besoins toute la journée!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!?????????????????
C’était à mes débuts dans la profession. C’était ma première lettre de bêtises. J’étais passionnée par mon nouveau métier que je découvrais et j’aimais beaucoup les enfants. Je me suis mise à pleurer (un réflexe assez aigu chez moi). Puis, une fois la morve séchée, je me suis demandé comment je pourrais faire comprendre à la maman que j’étais loin d’être le monstre qu’elle imaginait.
J’ai donc rédigé un roman à mon tour. Un roman qui racontait l’histoire d’une petite fille qui venait juste de revenir des toilettes lorsqu’elle m’a demandé pour aller boire. Je lui ai répondu qu’elle aurait dû boire lors de son dernier séjour à la salle de bain (qui datait de 10 minutes à peine) et qu’elle devrait attendre la prochaine récréation. Elle s’est remise au travail sans rechigner et n’a manifesté aucun inconfort. Elle n’a absolument pas pleuré! Pas plus qu’elle ne m’a parlé d’une quelconque envie de caca! À la fin de l’histoire, la petite fille a quitté l’école sans qu’aucun drame concernant ses matières fécales n’ait été décelé…
Mon roman n’a pas eu l’effet escompté. Vous traitez ma fille de menteuse!?
C’était une bonne petite fille, tout à fait charmante. Polie, à son affaire, souriante. Ce n’était pas une menteuse.
Alors comment pourrait-elle avoir menti à ses parents! C’était impossible à envisager.
Et bien permettez-moi, en cette frigide journée de janvier, d’y aller d’une déclaration fracassante. Une déclaration appuyée par plus de dix années en enseignement (roulements de tambour) :
TOUS LES ENFANTS MENTENT!!!
Parce qu’ils sont mal élevés, mauvais et perfides? Bien sûr que non! Juste parce que ce sont des enfants! Mentir constitue souvent un moyen très efficace d’éviter les punitions, de contourner les moments désagréables ou d’arriver à ses fins. Il faudra une longue éducation, cohérente si possible, pour les en dissuader! Il faudra qu’on les démasque et que mentir devienne plus risqué que de dire la vérité! C’est ce qu’on appelle apprendre…
Il arrive aussi que leur perception de la réalité soit juste outrageusement déformée! Ils ne sont pas toujours en mesure de comprendre tous les facteurs qui entrent en jeux lorsqu’un problème se présente à l’école. Lorsqu’ils disent à leur parent que l’ami qui les a tapé en pleine face avec une pelle n’a pas été puni ou que leur professeur n’a rien fait lorsque leur boîte à lunch a été volée, c’est souvent parce qu’ils ne sont pas au courant de ce qui a été mis en place!
Mon propre fils m’a souvent raconté des événements supposément arrivés à l’école qui me donnaient envie de sauter au plafond! Mais après vérification, il y avait TOUJOURS des nuances significatives à apporter à ces récits.
(Cet album de Peter Brown pique vivement ma curiosité)
Évidemment, quand notre enfant nous raconte qu’il est persécuté à l’école, que personne ne l’aime, que son professeur crie toujours et refuse qu’il sorte aux récréations, une vérification s’impose! Mais voici le grand conseil du jour, celui pour lequel j’ai eu envie d’écrire cet article : toujours faire en sorte que la vérification précède la colère (ou la lettre d’insultes)…
… Ben en fait, la lettre d’insultes n’est jamais vraiment nécessaire. En tant que pacifiste invétérée, je pense qu’il existe 203947475 autres solutions beaucoup plus efficaces!
Et cette même règle doit bien sûr s’appliquer de notre côté, travailleurs en éducation! Il est tout aussi important pour nous de savoir faire la part des choses!
– Ma mère me bat avec un bâton.
– Mon père m’a acheté un ski-doo et je le conduis moi-même.
– J’écoute toujours des films de 18 ans et plus!
– Je suis allé en Floride pendant la fin de semaine!
– Mes parents m’ont offert un vrai ours polaire. Je dois m’en occuper pendant les congés.
– Mes parents M’INTERDISENT de faire des devoirs!
– Je me couche toujours plus tard que minuit.
– Moi, je ne prends jamais de bain.
– Mon père a lancé ma mère dans le mur. Il criait tellement fort que les voisins sont venus.
Ce sont toutes des choses (et j’en passe) que des enfants de 6-7 ans m’ont dites, souvent en pleine classe et devant tout le monde. Certaines se sont avérées exactes. La majorité ne l’étaient pas (ou juste en partie).
Le ski-doo appartenait en fait au « mononcle » qui avait enseigné à son petit neveu comment le conduire. Avec lui, évidemment.
Ce genre de nuance quand même significative. J’ai vérifié aux sources chacune de ces situations.
Je ne vous mentirai pas, il m’est arrivé de porter des jugements ou de commencer à gronder de l’intérieur à l’écoute des confidences des enfants. Mais toujours en sachant que la première étape était la vérification!
Alors la prochaine fois que votre enfant vous raconte que son horrible professeur l’a fait asseoir devant toute la classe, lui a baissé les pantalons et lui a léché le nombril, je souhaite que ce mot s’impose à votre esprit :
VÉRIFICATION!
Et je m’engage à faire de même quand votre petit me racontera que vous l’avez embarré dehors en plein hiver pendant 3 jours et qu’il a dû se nourrir d’une couleuvre qu’il a trouvée dans la neige…
Dans tous les cas, une chose est sûre : l’imagination de nos enfants est sans limite!
Et vous, quelles sont les histoires abracadabrantes de vos enfants (élèves)?
J’en veux plus:
Pourquoi l’enfant ment-il, de Anne Jeger
Ce que les profs ne peuvent pas faire…
Tu sais que tu es marié à une enseignante au primaire quand…
Julie Allard dit
Cet article devrait être lu avec tous les parents dans les écoles! On en règlerait beaucoup des problèmes comme ça. Avec les enfants rois viennent souvent les parents souverains… et malheureusement on accorde plus de crédibilité à une enfant de 6-7-10 ans qu’à un adulte en position d’autorité! Donnons nous le droit de mettre en doute la parole des enfants, en leur laissant raconter leur histoire mais en gardant nos émotions pour nous jusqu’à la vérification des faits et nuances tel que vous le décrivez dans l’article! Je suis psychoéducatrice et je trouve que c’est une grosse problématique de nos jours 🙁
Marie-Josée dit
Les élèves qu’on empêche d’aller aux toilettes. Ah Ah Ah! (Mais c’est quoi cette fascination pour la salle de bain?)
Le matériel scolaire qui ne revient pas à l’école (et vice-versa) et les excuses autour….
Les lunchs que l’éducatrice du SDG ne laisse pas l’enfant manger (ça c’est de l’un de mes garçons).
Des mensonges j’en ai eu des épouvantables!
Des parents partis en voyage et l’enfant seul avec sa grande soeur de 10 ans pour la fin de semaine…
Des animaux assez loufoques qui sont adoptés à la maisons.
Une fillette de 7ans (il y a une quinzaine d’années) annonçant que dorénavant elle allait porter le niquab et qu’il y aurait une grande fête pour elle durant la fin de semaine(parents non-pratiquants) et qui évidemment ne veut plus venir à l’école le lundi de peur de passer pour une menteuse…
Une élève qui dit à sa mère que je la traitais de menteuse devant toute la classe lorsque je lui demandais de retourner à sa place pour laisser des traces (ah! ces fameuses traces!) de ses calculs. Elle les avait fait dans sa tête… et ne voulait évidemment pas en faire plus…
Une fillette de 10 ans, disant être embarquée avec un étranger à l »heure du midi et ayant réussi à s’enfuir…
Un garçon de 6 ans, très introverti, qui avait la chance de dîner à la maison, mais qui revient un midi, en sanglots, en annonçant qu’il avait vu sa mère, étendue par terre dans la cuisine, avec un couteau dans le dos…(avec la police et tout le tralala qui s’en est suivi, il a connu son heure sous les feux de la rampe!!!)
et j’en passe..
Guy Vandal dit
J’ajouterais, même si je ne suis pas un enseignant diplômé, que je connais bien la « sauce » de par mon expérience comme animateur de plein air pendant près de neuf ans et les cours de guitare que je donne depuis longtemps. J’ai observé à maintes reprises que l’imagination des parents est parfois tout aussi fertile que celle de leurs enfants. Un jour il y a longtemps un parent me dit à deux pouces de mon nez, le plus sérieusement du monde, qu’il retirait son enfant de mes cours. Je ne conteste pas, et j’attends la suite. Oups ! de toute évidences, mon silence n’était pas prévu dans le plan de match. On aurait dit, que le parent en question, cherchait son air. Il finit par ajouter que son enfant « plafonnait ».
Et c’est là que j’ai sorti la « question qui tue »: Combien de temps consacre-t-il à la pratique de son instrument ??? Il me répond, presque avec avec fièreté: » une bonne demi heure par semaine. C’est là que j’ai sorti ma « réponse qui assomme »: » Vous faites bien de le retirer !…, le temps de pratique pour apprendre un instrument requiert une comptabilisation du temps en demi heures par jour !… Oh !… j’ai compris que le parent venait de comprendre quelque chose… finalement il a maintenu son enfant dans mon cours et ne me demandez pas pourquoi, il s’est mis à progresser et aujourd’hui c’est un fichu bon guitariste !!! Alors Julie comme tu le dis, surtout quand le parent a le courage de te parler en pleine face, la vérification est toujours de mise, avec tact, gentillesse et fermeté.