– Hey Julie! On vous a vus dans Lapresse+ ce matin!
Et oui, c’était bien nos frimousses, la mienne et celle de mes 2 grands. Mais ce qui me fait bien rigoler, c’est de penser que les gens ne soupçonnent pas l’histoire derrière la photo! Alors juste pour le plaisir, voici à quoi MOI je pense quand je vois cette image circuler sur le Web :
C’était un mardi. Un jour de semaine. La normalité, le chaos matinal. L’impression d’être pressée qui se présente dès qu’on ouvre les yeux.
C’était ce genre de matin.
Mon garçon s’est levé avec de la fièvre. En bons parents dévoués… nous l’avons bourré de Advils et avons décrété qu’il « allait être correct » (honte à nous)! Mon amoureux est parti pour le travail en autobus et j’ai empilé la marmaille dans l’auto.
Avant de quitter, j’ai traversé la maison en me disant que c’était sans doute l’un des pires fouillis qui soit! Les graines du déjeuner emplissaient la table et le plancher, des coulis de caramel sur la nappe. Personne n’aurait pu dire la couleur de mon comptoir, enfoui sous une pile vraiment exagérée de vaisselle pas propre. Le salon était plein des jouets de la veille sur lesquels nous avions lâché prise dans un excès de fatigue.
Bref, nous avions perdu le contrôle de la situation.
Je suis partie de la maison enrhumée, pas coiffée, tout juste maquillée (ben oui, moi le maquillage c’est à la vie à la mort!). J’espérais trouver une minute, peut-être à la récréation, pour me refaire une beauté.
Ce n’est pas arrivé.
J’ai fait mon premier arrêt à la garderie. J’y ai laissé mon tout petit, encore attendrie, même après mille fois, par le bisou qu’il a déposé sur ma joue et le petit clin d’œil qu’il m’a fait pour me dire au revoir.
De retour à la voiture, mon fils était en pleurs.
– Maman, j’ai trop mal à la tête!
Tout rouge, visiblement fiévreux. Le Advil n’avait pas fait le travail. L’évidence était là : je ne pouvais pas l’emmener à l’école! L’autre évidence, un peu plus difficile à avaler, c’était que je devais être dans ma classe dans vingt minutes; impossible de penser trouver une remplaçante.
J’ai dû faire appel aux premiers répondants. Ceux qui nous aiment et qui répondent toujours au téléphone le matin. Juste au cas où on aurait besoin d’aide.
– Emmène-le à l’école, je vais venir le chercher!
Super-mémé à la rescousse! Encore…
Après l’école, une réunion du personnel m’attendait (de celles où on règle en une heure des choses qui pourraient se régler en moins de trois minutes).
Je ne voulais pas attendre la fin de cette interminable réunion avant d’aller chercher mon fils chez super mémé. À la dernière période, j’ai donc bondi dans ma Caravane et j’ai filé le récupérer. On m’a annoncé qu’il était en pleine forme! Il avait même refait le pavé avec pépé….
J’ai soupiré. Mon petit contremaître était un peu trop content de cette journée spéciale!
Je l’ai déposé (pour ne pas dire « dompé ») au service de garde et me suis tapée l’I-N-T-E-R-M-I-N-A-B-L-E réunion.
Toujours pas peignée.
17h15, j’ai récupéré mes deux grands, suis arrêtée chercher mon petit à la garderie. J’ai savouré un instant le gros câlin qu’il m’offrait, ses petites mains chaudes autour de mon cou.
Puis je n’ai voulu qu’une chose : Arriver à la maison, foncer dans mon lit sans même regarder le ménage, et dormir.
Quand ma voiture s’est garée dans l’allée, mon bel homme est sorti m’accueillir sur le perron.
On s’aime. Beaucoup. Mais pas au point de sortir pour s’accueillir… C’était louche.
– Y’a quelqu’un qui t’attend dans la cuisine.
Dans ma cuisine!? Mon Dieu, faites qu’il soit aveugle! Et sourd du nez pour ne pas percevoir l’odeur de la vaisselle sale!
– C’est un photographe de la Presse et du Soleil. Il dit qu’il avait rendez-vous avec toi. À 17h15. Ça fait quinze minutes qu’il t’attend.
Un photographe dans mon salon! Juste ça! Je repense à l’état de mes cheveux, à mon nez bouché, à ma maison! L’envie me prend de rembarquer dans mon char et de disparaître quelques jours.
Je dépose mes choses. Il est assis là, l’air relax, un verre d’eau à la main, son appareil photo dans l’autre.
Je ne peux pas croire qu’il soit assis à ma table, dans nos graines de muffins! Et s’il restait coincé dans un coulis de caramel?
Je me confonds en excuses. Pourtant, ce n’est pas de ma faute! La journaliste m’avait demandé mes disponibilités.
– Un photographe te contactera pour confirmer le moment, m’avait-elle dit.
Clairement, il y a eu confusion. Jamais personne n’a confirmé le moment! J’essaie de lui expliquer mais il s’en fout un peu. Pour lui, l’important c’est de repartir avec les photos!
J’ai tellement perdu le contrôle. Je déteste ça! Dans les yeux de mon homme, il y a un soupçon de compassion… et beaucoup, beaucoup trop d’amusement!
Ma fille a les cheveux tout ébouriffés. Mon garçon porte des vêtements dont les couleurs donnent mal à la tête. J’essuie la croûte sous leurs nez (question de faire honneur à tante Marie) et je réclame quelques secondes pour me rendre présentable!
Il est calme. Relax. Gentil.
– Pas de problème. Mon prochain rendez-vous est à 18h30.
Il est 17h40. Et là, je réalise que je ne suis pas au bout de mes peines!
– Merde! Merde!
Le photographe m’interroge du regard. Le concept de la photo c’est de voir des enfants jouer au IPad, assistés par leur maman.
Mon Ipad est à l’école.
Je ne sais plus quoi dire. On cancelle tout, on laisse faire!
Mais ce photographe semble en avoir vu d’autres. Il m’accorde 10 minutes pour faire l’aller-retour à l’école.
Je rebondis dans ma caravane, je peste contre les feux rouges. J’entre dans ma classe, toujours pas coiffée. Je tousse.
Je reviens en catastrophe, onze minutes plus tard.
Je sais qu’il commence à être pressé. Pas question de lui demander du temps pour me changer. Me peigner?
Il ne me reste plus rien de mon orgueil.
Les enfants s’amusent au Ipad et il gravite autour d’eux, s’enfargeant à l’occasion dans les jouets éparpillés.
Il repart satisfait.
Quand la porte se referme, je laisse échapper un interminable soupir!
J’ai l’habitude d’être en contrôle.
Cette photo évoque pour vous deux enfants, un Ipad et une maman dodue.
Pour moi, elle est ce moment où le lâcher-prise n’était plus une option.
Et surtout, elle me rappelle qu’il est impossible, même très bien intentionnée, de tout contrôler.
Quelque chose me dit que j’aurai souvent besoin de m’en rappeler!
Vous en voulez plus?
Marie-Josée dit
T’es sûre que tu ne vis pas quelque part dans ma maison?
Natacha dit
Mon Dieu, mon Dieu, mon Dieu… Ayant moi-même 3 enfants, je comprends TELLLLLEMENT cet état d’esprit. Cet anecdote est tout simplement délicieux! Vous écrivez d’une façon extraordinaire! Bravo ! 🙂
Julie dit
Merci beaucoup Natacha!