Il y a quelque temps déjà, je suis tombée sur ce superbe texte qui a beaucoup circulé sur le Web : « Le jour où j’ai cessé de dire dépêche-toi ».
Comme toutes les mamans pressées, je m’y suis reconnue.
Oui, j’étais cette maman qui, le matin, bardasse les troupes un smoothie à la main, jusqu’à ce que tout le monde s’entasse (de bonne humeur de préférence) dans l’auto.
Bouleversée par ce reflet peu flatteur de moi-même et mue par une culpabilité certaine, j’ai voulu prendre les choses en main !
Non, je ne serais pas cette maman qui empêche ses petits de savourer la vie. Je ne serais plus ce caporal froid et intransigeant qui mitraille ses enfants de consignes sur le pas de la porte !
Pendant plusieurs mois, j’ai sursauté chaque fois qu’un enseignant prononçait le diabolique « dépêche-toi » dans le corridor (et je peux vous dire que j’ai sursauté plusieurs fois par jour)… Mais surtout, j’ai tenté de le bannir de mon propre vocabulaire et d’accepter de vivre avec les délais attribuables à ma progéniture.
J’aimerais vous dire que ce fut un succès… Que nos matins devinrent harmonieux. Que nos soirées devinrent paisibles.
Ouin. Pas exactement. Je voulais bien leur offrir un peu plus de temps, mais je me suis vite aperçue que même en les réveillant plus tôt, en les prévenant à l’avance du départ qui approchait, de multiples circonstances faisaient en sorte qu’on se retrouvait toujours en panique sur le pas de la porte.
Avec mon conjoint qui doit attraper son autobus à 7h42 tapant, il est difficile de résister à la tentation de pousser dans le derrière mon garçon de 4 ans qui veut absolument apporter « son nouveau-dragon-cracheur-puissant » pour le montrer à ses amis de la garderie.
Quoique l’on fasse, ils ont beau être prêts 15 minutes en avance et se prélasser sur le divan, quand vient le moment fatidique du départ, il y en a toujours un qui a oublié quelque chose, qui n’a pas remis son cartable dans son sac d’école la veille, qui ne trouve pas sa mitaine, qui a envie de caca juste après avoir enfilé son habit de neige…
Il m’est arrivé de me rendre compte en aidant mon petit dernier à se préparer, qu’il ne portait rien sous son jeans ! Il avait omis l’étape de l’enfilage des bobettes ce matin-là ! Comment alors éviter de le bousculer ? Pas de problème mon petit, prends ton temps, choisis tes bobettes préférées ?
Je ne peux quand même pas laisser mes élèves arriver avant moi au travail pour une histoire de bobettes !
Et puis le soir, quand approche 20h00 et qu’il nous reste encore du linge à plier et des copies à corriger, un petit « dépêche-toi » à notre enfant qui joue avec le bouchon du tube de pâte à dents depuis 10 minutes ne pourrait-il pas être considéré comme sain et légitime ?
Après avoir déployé beaucoup d’énergie sur le dossier pour tenter de me déculpabiliser, j’en suis venue à une conclusion ; le seul moyen d’éliminer le « dépêche-toi » de nos vies serait d’en occulter toutes nos obligations. D’arrêter de travailler. D’accepter que nos enfants arrivent en retard l’école ou de manquer un rendez-vous chez le dentiste par ci par là. Et pour mon bel Adonis, de laisser l’autobus lui passer en pleine face !
Nous ne sommes pas prêts pour ça.
Même s’il est bien sûr porteur d’un stress indéniable, le « dépêche-toi » a aussi ses bons côtés en éducation.
Au risque de ne pas faire l’unanimité, il me semble qu’il n’est pas forcément mauvais pour les enfants d’apprendre qu’ils ne sont pas toujours libres de leur emploi du temps. Que dans la vie il existe aussi ce qu’on appelle des obligations ! Que la ponctualité est une marque de respect et que les occupations des autres sont aussi importantes que les leurs.
J’entends parfois des commentaires, des gens qui se scandalisent du fait que les enfants doivent se plier à l’horaire de leurs parents.
« Pourquoi les enfants devraient-ils s’adapter à notre mode de vie et non l’inverse ? »
Ce genre de discours me fait un peu sursauter. Je ne sais pas comment ça se passe ailleurs, mais chez nous, l’horaire est plus souvent qu’autrement construit autour de nos enfants !
Nous élaborons nos plans autour des fêtes d’amis, des commissions infinies pour leurs vêtements, lunchs et petits bobos, de leurs cours de musique ou de leurs activités physiques.
Non mais sérieusement, je ne suis certainement pas la seule maman à parcourir la ville de long en large pour aller porter ses petits chez Pierre – Jean – Jacques le week-end !
Et je me dépêche. Pour ne pas qu’ils arrivent en retard !
N’est-ce pas un juste équilibre des choses, dans une certaine mesure, qu’ils doivent à leur tour vivre avec nos matins plus pressés quand arrive la semaine ?
Alors je le confesse, j’ai baissé les bras, je n’y suis pas arrivée.
Je suis cette maman qui dit encore « dépêche-toi » à l’occasion… Et qui ne s’en porte pas si mal finalement !
À défaut de pouvoir changer, il faut parfois savoir assumer…
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MARIE-JOSEE dit
Le relâchement doit se faire dans la routine du soir, quand le seul horaire est de partir vers le domaine du rêve. Je suis loin d’être une championne, mais je crois que les enfants nous donnent toute une leçon de vie quand ils prennent, eux, le temps de vivre. Vive la relâche qui s’en vient, et profitons-en bien!
Papa Alex dit
Haha c’est excellent. Merci de nous déculpabiliser un peu… c’est vrai que « le jour où j’ai cessé de dire dépêche toi » nous avait frappé aussi… je pense qu’encore une fois la réponse se trouve dans l’équilibre! Si nous étions une société sans horaire (comme il en existe!) je pense que nous pourrions laisser nos enfants vaquer à toutes leurs obscures occupations hors du temps… mais la vie au Québec est toute autre!
Juste de se dire qu’on fait attention pour ne pas leur mettre trop de pression, de garder du « lousse » un peu dans nos horaires quand on peut et de lâcher un peu la pression, c’est déjà un bon pas pour la qualité de vie familiale… et c’est vrai que c’est un bel apprentissage la gestion d’un horaire et la ponctualité!
Merci encore pour ton regard sur la réalité, vivifiant et rafraîchissant!
Emmanuelle dit
Un beau sourire sur mon visage ce matin en lisant votre texte! Je suis heureuse de savoir que je ne suis pas la seule à penser comme vous.
Bonne journée!