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Quand une année se termine

16 juin 2015 par Julie 10 commentaires

Ça ne se passe pas toujours de la même manière.  Les émotions qui s’y pointent ne sont pas toujours les mêmes…

Les années scolaires se suivent sans forcément se ressembler.  Alors les fins d’année scolaire ont aussi chacune leur saveur.

fin2Je pense pouvoir dire, sans me tromper, que la dernière journée de notre première année d’enseignement se passe rarement sans larmes.

Pour moi, c’était en juin 2005.  J’ai pleuré comme un veau une bonne partie de cette dernière journée.

Dans mon inexpérience, j’avais vécu mon aventure avec mes 24 élèves de 1re année sans aucune retenue.  Je n’avais pas encore réalisé qu’une année scolaire ne durait qu’un an! Je m’étais investie comme s’ils allaient être à moi pour la vie…

Alors oui, quand j’ai dû les quitter, j’ai passé un sale quart d’heure!

Par la suite, j’ai mieux géré.  Je commençais l’année en sachant que je n’avais que trois saisons et pas une de plus devant moi.  Alors quand venait la fin, les choses se faisaient plus naturellement.

Jusqu’à cette année là, celle où tout a basculé.

L’année où j’ai compris que mon métier pouvait avoir raison de moi.  Une année dont je me souviendrai toujours.  Beaucoup trop d’élèves.  Beaucoup trop de problèmes.  Beaucoup trop de besoins.

Des explosions à n’en plus finir, milles feux à éteindre; j’étais bien plus pompière qu’enseignante!  Travailleuse sociale et agente de paix…

Cette année là, j’ai fermé les yeux et j’ai foncé, espérant être encore vivante quand je les rouvrirais en juin!

À mon dernier jour avec eux,  j’ai soulevé les paupières et me suis aperçue que je respirais toujours, mais que j’étais salement amochée.

J’ai passé la journée avec une boule étrange au fond de l’estomac.  Un mélange de soulagement d’avoir survécu, d’amour trop fort pour mes petits écorchés et de crainte pour mon avenir.

Est-ce que je m’en remettrais un jour?  C’était la question qui me hantait.  Je n’étais plus l’enseignante solide et confiante que j’avais l’habitude d’être.  J’étais affaiblie.  Je contemplais mes milles miettes sur le sol et me demandais par où commencer pour les remettre ensemble.fin3

Quand la dernière minute avec eux est arrivée, je leur ai donné une dernière consigne :  interdit de partir sans que je vous aie serrés dans mes bras.  Alors tour à tour, ils m’ont enlacée.

C’est là que j’ai compris pourquoi il m’était si difficile de les quitter.   Ils avaient encore besoin de moi.

Il y avait cet enfant qui venait d’être retiré de son milieu familial violent.  Cet autre, en attente d’une famille, qui s’accrochait à moi en pleurant de gros sanglots.

Cette enfant aux yeux bridés qui m’était arrivée aussi sauvage qu’un petit animal, et qui se tenait maintenant devant moi, splendide dans son humanité retrouvée, mais effrayée à  l’idée de revenir en arrière.

Je n’avais pas l’impression de clore un chapitre comme je le faisais par les années passées, fière et satisfaite.  J’avais l’impression de les abandonner dans un moment crucial de leur vie.

J’ai fait mon dernier câlin et m’en suis retournée à ma classe.  J’ai fermé la porte derrière moi.  Je l’ai verrouillée.  Je me suis cachée dans un coin et j’ai pleuré toutes ces larmes qui s’amoncelaient dans mon ventre.  Toutes mes appréhensions se sont faites entendre dans de douloureux sanglots qui m’ont secouées de longues minutes.

Quand la tempête s’est calmée, j’ai essuyé mes joues.  J’ai mis de l’eau sur mon visage.  J’ai déverrouillée ma porte.  J’ai pris mon sac et, sans me retourner, je suis sortie.

Je tournais une page, que je le veuille ou non.

C’est ce que nous faisons chaque fois qu’une année se termine.  Nous tournons une page.  Nous laissons aller ces élèves qui ne nous ont jamais appartenu.

Il ne reste plus que 5 jours à cette année qui s’achève.  5 jours avec eux.

Cette fois-ci, je n’ai aucune crainte.  Mes élèves ont de bons milieux, sont entre très bonnes mains.  N’ont plus besoin de moi.

Pourtant, je prévois tout de même quelques grandes émotions quand le dernier jour se pointera.

Ce ne sera pas des sanglots qui font mal.  Juste quelques larmes de reconnaissance pour ces 20 petites perles qui m’ont permis de me reconstruire.

Je ne savais pas, quand ils sont arrivés en septembre, combien j’avais besoin d’eux.

Ce sera une belle fin d’année.  Pleine de fierté, de satisfaction et d’affection.  Je laisserai voguer vers d’autres ce groupe extraordinaire et me préparerai en douce pour quelque chose de nouveau.

Reconstruite.  Rafistolée.  Grâce à eux.

Bonne fin d’année scolaire à vous tous enseignants, parents, élèves.  Permettez-vous de vivre le moment, qu’il soit bon ou douloureux.  Je pense qu’il est nécessaire de laisser place aux émotions qui viennent avec les adieux, quelles qu’elles soient.

Et on ne sait jamais quels petits miracles l’année suivante nous réserve…

 

Children skipping and jumping up a hill. OUTDOOR ADVENTURE Exclusive only at istockphoto • stevecoleimages • Atlanta, Georgia [url=http://www.istockphoto.com/file_search.php?action=file&lightboxID=5758984 [img]http://dl.dropbox.com/u/40249541/ISP%20Banners/OutdoorAdventure.jpg[/img][/url] [url=http://www.istockphoto.com/file_search.php?action=file&lightboxID=8282165 [img]http://dl.dropbox.com/u/40249541/ISP%20Banners/RoadTrip.jpg[/img][/url] [url=http://www.istockphoto.com/file_search.php?action=file&lightboxID=9072846 [img]http://dl.dropbox.com/u/40249541/ISP%20Banners/Lifestyle.jpg[/img][/url]

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Classé sous :Julie la prof, pêle-mêle Balisé avec :année, école, enseignant, fin, juin. vacances, prof, scolaire

Qui est Joyeuses Catastrophes ?

Je suis maman, maladroite, enseignante, émotive, amoureuse...
J'ai 40 ans, 3 enfants et plein de choses à dire... Ou plutôt, à écrire, c'est tellement plus facile! Merci de me suivre, de me faire réfléchir, d'enrichir ma vie de vos commentaires...
Pour ceux qui en veulent plus, mon livre de chroniques "Trentenaire sans histoire" ainsi que mes deux romans "180 jours et des poussières" et "180 et le coeur plein" sont disponibles aux Éditions De Mortagne.
Joyeuses catastrophes à tous! En savoir plus...

Commentaires

  1. Sylviane Brurat dit

    18 juin 2015 à 14 h 17 min

    Je m’y reconnais tellement… on dirait que c’est moi !

    C’est que qu’on appelle des enseignants/es engagés/es. L’enseignement est une profession… oui, mais surtout un sacerdoce.

    J’adore mon métier depuis toutes ces années malgré les ambuches et les changements, les remises en questions… La roue tourne, mais nous serons toujours là pour les enfants.

    Répondre
  2. Chantal dit

    17 juin 2015 à 2 h 55 min

    Laissez-moi d’abord vous remercier d’avoir partagé ce merveilleux récit. Je m’y suis tellement retrouvée.
    Après 25 ans dans l’enseignement, je vis toujours dans cette grande tristesse lors du départ des enfants, mes enfants comme j’aime si souvent le dire.
    La différence maintenant est que j’ajuste ma pensée en me disant que je les aime tant et qu’au moins je les reverrai en début d’année. Pendant le mois de septembre, je les invite à dîner avec moi et c’est l’occasion d’échanger, d’observer les changements chez eux et de leur dire que je suis toujours là en cas de besoin. Ceux qui sont plus émotifs ou insécures viennent me voir souvent. Les autres font leur p’tit bout de chemin.
    Mon plus grand bonheur depuis quelques années est de rencontrer, par hasard, d’anciens élèves qui sont mariés et qui ont des enfants. L’échange entre-nous est formidables.
    Je vous souhaite bonne route !

    Répondre
  3. Maryse dit

    16 juin 2015 à 23 h 01 min

    Je suis en adaptation scolaire avec des ados en troubles de comportement.
    Je termine ma 24e année d’enseignement; 10 ans avec des rough’n tough, 14 ans avec des plus soft.
    J’ai eu toutes sortes d’années: des roses, des bleues, des noires…
    Ton texte, c’est tout à fait ça!
    Merci de l’avoir partagé avec nous!
    Bon été!

    Répondre
  4. Amé dit

    16 juin 2015 à 22 h 43 min

    Oh! Je viens de découvrir ton blogue! C’est merveilleux ce texte

    Répondre
  5. Ariane dit

    16 juin 2015 à 21 h 54 min

    La semaine passée, quand j’ai fait le classement, j’ai réalisé comment certains élèves n’étaient pas assez autonomes et pas tout à fait prêt pour la 5e année et ça me faisait mal en dedans. Un moment donné, j’ai réalisé que je leur avais donné tout ce que je pouvais et qu’ils avaient pris ce dont ils avaient besoin. Puis, j’ai décidé de lâcher prise et d’accepter que je n’étais dans leur qu’une année…

    Répondre
  6. Karine Martel dit

    16 juin 2015 à 17 h 57 min

    Ça me rassure de savoir qu’on peut se reconstruire l’année qui suit celle qu’on termine en miettes….c’est la toute première fois en 16 ans que je termine l’année détruite, découragée et démotivée…

    Répondre
    • Julie dit

      16 juin 2015 à 18 h 03 min

      Karine, je te comprends tellement! Et si ça peut t’encourager, je peux te dire que oui, on peut se relever. Ça prend de l’aide, de l’humilité, du lâcher-prise et un paquet de gens extraordinaires… Mais c’est possible! Passe de belles vacances. Tu seras dans mes prières.

      Répondre
  7. Marie-Josée dit

    16 juin 2015 à 16 h 49 min

    Tu m’as encore fait pleurer. C’est incroyable que tout ce que tu racontes me ressemble. Tes mots sont si beaux et sonnent si justes.

    Répondre
  8. Pash dit

    16 juin 2015 à 16 h 45 min

    Yo Julie, j’ai suivi tes chroniques à chaque fois et je peux affirmé sans hésitation que tu es sans aucun doute une enseignante hors pair. Nous n’avons pas encore pris notre décision au sujet du choix d’école pour nos filles, mais je veux que tu saches que j’espère qu’un jour tu pleureras car mes filles quitteront ta classe. 😉

    Je sais qu’elles aussi auront de grosse émotions à ce moment car c’est impossible que seulement toi soit touché par cette séparation. Je suis persuadé même leur jeune âge, ces kid vont ce souvenir de madame Julie longtemps.

    cheers et encore une fois félicitation pourton bon travail

    Répondre
    • Julie dit

      16 juin 2015 à 17 h 35 min

      Oh! Merci Pash! Tes filles sont tellement adorables, je serais assurément en amour avec elles après 2 jours à peine!

      Répondre

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