Tu es mon 2e enfant. Il y a eu un « avant-toi » et un « après-toi ». Deux ères complètement différentes.
J’ai souvent écris sur toi (entre autres ici, ici, ici, ici, ici, ici et ici). J’ai raconté quelques unes de tes aventures rocambolesques et de tes crises spectaculaires. J’ai mis sur papier ta fougue, ta passion… et ton incommensurable caractère de cochon !
Parfois pour me plaindre un peu. Parfois juste pour partager les moments forts et inattendus que je vivais avec toi.
Aujourd’hui tu as 7 ans. Aujourd’hui j’écris à nouveau sur toi. Mais cette fois, pour te remercier.
Sans toi, j’aurais pu croire encore longtemps que j’étais une mère parfaite (ou presque). Ton père et moi, on s’auto-louangeait parfois ! Notre fille aînée dormait bien, était calme et agréable. C’était forcément grâce à nous, ses habiles parents ! Quand les enfants de nos amis n’étaient pas couchables, je regardais ton père du coin de l’œil. Nous nous pétions les bretelles en silence, fiers d’avoir si bien su s’y prendre avec notre enfant ! Nous lui avions donné une routine constante, l’avions sécurisée et lui avions inculqué de bonnes habitudes. Ce que les autres ne semblaient pas avoir si bien fait.
Que d’orgueil et de prétention.
Grâce à toi, l’humilité a repris sa place. De gré ou de force. Aujourd’hui nous savons… que nous ne savons pas ! Qu’il n’existe parfois aucun livre qui vienne à bout de faire dormir un enfant. Qu’un petit peut, même quand on croit lui avoir donné constance et sécurité, s’époumoner toute la nuit lorsque le cœur lui en dit ! Et faire des trous dans les murs pour un oui ou un non.
Merci de nous avoir appris la patience (bon, l’apprentissage est encore en cours mais quand même…), la persévérance et la tolérance. Après toi, nous avons cessé de faire les gros yeux aux parents qui se promenaient avec un petit en crise sous le bras, incapables d’en venir à bout. Nous avons joint leurs rangs, la queue entre les jambes !
Merci de nous avoir rendus plus humains, plus indulgents, prêts à gracier et à comprendre.
Te voir grandir est un spectacle saisissant. Tu nous étonnes chaque jour. Il jaillit de toi et de ton volcan embrasé, d’époustouflantes merveilles qui nous laissent bouches bées. Certaines dont nous pouvons prendre le crédit, d’autres qui te reviennent entièrement.
Quand tu as commencé la maternelle, j’étais enseignante de première année. J’étais ta voisine, la porte d’à côté.
Je craignais alors le jugement des autres. Que diraient mes collègues et les autres parents si tu décidais de leur montrer de quoi tu étais capable ? De quoi j’aurais l’air, moi ta mère. Je m’en faisais pour rien. Tu as été formidable. Tu t’es contrôlé, ne gardant que pour nous les crises et les bouderies.
Un jour, alors que j’allais te cueillir au service de garde, tu es parti en courant. Je t’ai appelé, pour que tu m’attendes, mais tu m’as ignorée et tu as poursuivi ta route. J’ai dû courir après toi, entre deux sourires aux parents de mes propres élèves, qui venaient chercher leurs enfants. Quand je t’ai rattrapé, j’ai mis les choses au point avec toi : « Tu m’attends, tu ne cours pas. ». Tu semblais avoir compris. Tu m’as même souri. Je t’ai déposé par terre et… tu t’es aussitôt enfui de nouveau ! Quand je t’ai rattrapé, tu t’es mis à hurler. Tu t’es jeté par terre et tu as exposé devant tous ce que tu gardais habituellement pour la maison. Un beau bacon frétillant sur le plancher de mon école. Incapable de te faire entendre raison, je t’ai attrapé sous mon bras et j’ai baissé la tête pour ne pas voir les regards qui se posaient sur moi.
Comment les parents de mes élèves pourraient-ils avoir envie d’écouter ce que j’aurais à leur dire après avoir vu ça ? Avais-je vraiment des conseils à leur donner ? Je t’en ai voulu de m’arracher pour un caprice, ce qu’il me restait de crédibilité.
J’étais furieuse. Pas pour la crise, j’en avais vu d’autres. Pour l’humiliation.
Aujourd’hui, pour ça aussi je te remercie. Même si la pilule était difficile à avaler, j’avais complètement tort quant à l’effet qu’aurait cet incident sur les parents de mes élèves. Dans les années qui ont suivi, plusieurs se sont confiés à moi sur les difficultés qu’ils vivaient avec leurs enfants.
« Vous aussi, vous avez un garçon difficile je crois », me disaient-ils.
À nouveau, tu m’avais rendue plus humaine, plus accessible.
J’aurais aimé tout contrôler. Mais tu m’as tôt fait plonger dans la réalité. Le contrôle est une illusion et sa poursuite futile est une mission épuisante.
Le garçon que tu deviens est fougueux, sensible et créatif. Tu ne te jettes plus vraiment sur le sol, mais tu n’as rien perdu de ta force de caractère. Hier encore, devant la mère de ton ami, tu as su remettre mon orgueil à sa place.
Comme à chaque fois, ce fut un coup en pleine face.
Un coup pour lequel je n’ai pas le choix de te remercier.
Tu me rends meilleure. Plus vraie. Plus humble.
Alors pour toutes les variantes de la crise du bacon que tu as exécutées, pour ta façon candide de n’avoir rien à foutre de ce que les autres allaient en penser, merci.
Les enfants sont des trésors, oui, mais pas des faire-valoir.
Avec toi mon garçon, mon inestimable trésor, la nuance est limpide.
p.s. Crédit photo Cindy Bouchard
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Helen Hayes Desjardins dit
Merci Julie pour tes beaux partages!!!
Ton humilité!!
Tu deviens plus sage avec toutes ces expériences de ta vie!!!
Je pourrais te parler longuement sur le contrôle!!!
Et aussi sur les petits garçons qui bougent !!!!les plus attachants!!!!